Imprimer
Catégorie : Spectacles de danse

Rubrique spectacle danse indienneHaut lieu de l'expression musicale à Paris, la Cité de la Musique accueille le 18 avril, Ekathara Kalari et sa troupe de théâtre kathakali (Inde du Sud) , une forme de théâtre dansé, dont les acteurs muets ne s'expriment que par une gestuelle très structurée au rythme des chants et des percussions qui les accompagnent...

L’Épopée du Ramayana - La Mort du démon Lavanasura

"Le kathakali est l’expression théâtrale la plus connue et sans doute la plus spectaculaire de l’Inde", écrit l'ethnomusicologue Laurent Aubert. Ses sources, explique-t-il encore, remontent non seulement aux théâtres kutiyattam et krishnattam, mais également à différentes formes de rituel spectaculaire d’offrandes votives propres à la région du Kerala (comme le mutiyettu et le teyyam). Les thèmes du kathakali sont toujours empruntés au Ramayana, au Mahabharata et aux Purana, les chroniques de l’Inde ancienne.

Danse de l'Inde : Le Kathalali

Afin de représenter les dieux et les démons mythologiques avec la force expressive requise, le kathakali met en oeuvre nombre d’artifices théâtraux et travaille d’autant plus l’apparence des personnages qu’ils sont muets. Les acteurs, en effet, ne parlent pas, la narration étant confi ée aux récitantschanteurs, accompagnés par un jeu des tambours. L’expressivité des rôles est ainsi confi née à la dimension visuelle, selon une symbolique savamment codifiée à laquelle participent la gestuelle, la danse, les comportements stylisés, les costumes aux couleurs vives ainsi qu’un art du maquillage unique, donnant aux héros une apparence surhumaine.

Ce spectacle est diffusé en direct sur le site Internet www.citedelamusique.fr
Il y restera disponible gratuitement pendant un mois.

Troupe des artistes de Ekathara Kalari
Sadanam Krishnankutty, Margi Vijayakumaran Nair, Sadanam Bhasi, Sadanam Sadanandan,

Interprétation
Kalanilayam Unnikrishnan, Kalanilayam Rajeevan, chant
Kalamandalam Hariharan, Kalamandalam Balaraman, percussions
Margi Raveendran Nair, R. L. V. Somadas, Cheril Vinodkumar, R. Gopan, maquillage, assistants
Ravi Gopalan Nair, direction artistique

Quand ?
Samedi 18 avril 2009

Combien ?
Tarif B : 25€ & 30 (plus d'informations)

Comment ?
Réservations au 01 44 84 44 84 et
www.cite-musique.fr

Où ?
Cité de la Musique
221 avenue Jean-Jaurès - 75019 Paris
Métro Porte de Pantin

{mosmap width='460'|height='300'|lat='48.889092'|lon='2.393277'|zoomNew='0'|mapType='Map'|showMaptype='1'|overview='0'|tooltip='Cite de la Musique'|marker='1'|align='center'}
Carte intégrée - Vous pouvez la déplacer à l'aide de votre souris, mais aussi changer le zoom, et le type de vue (carte, satellite ou mixte)

L’épopée du Ramayana
Les traditions artistiques traitant de la figure de Rama sont particulièrement diverses et concernent tous les milieux de la société indienne (rural, urbain, hautes castes, dalits, groupes tribaux) ainsi que toutes les formes expressives comme la sculpture, la peinture, le tissage, la musique, la danse et le théâtre. Elles ont été élaborées à différentes époques, d’avant notre ère jusqu’aux interprétations les plus contemporaines comme le cinéma populaire, la bande dessinée, le dessin animé, l’image 3D et les jeux vidéo. Pourquoi une telle omniprésence culturelle ? Le Ramayana, composé de sept livres en sanskrit, est attribué au sage Valmiki qui en aurait reçu la révélation du dieu Brahma. Sa datation est incertaine, entre le IVe siècle av. J.-C. et le IVe siècle ap. J.-C. Cette épopée est cependant bien plus qu’un simple thème de littérature qui aurait été adapté à différents arts. Elle doit se comprendre à travers l’ensemble des valeurs qu’elle représente. En Inde, chaque homme aspire plus ou moins consciemment à être aussi héroïque que le prince Rama, aussi dévoué que son frère cadet Lakshmana, aussi calme, objectif et dévot que le grand singe Hanuman, aussi fidèle et courageux que la princesse Sita. L’aspect multidimensionnel du mythe et ses significations sont vécus comme partie intégrante du quotidien tout comme un divertissement indissociable des propos moraux et sociaux qu’il porte : l’ordre cosmique dharma devra être rétabli dans les moments de chaos ; le couple Rama-Sita triomphera du désordre instauré par le roi maléfique Ravana. Aujourd’hui en Inde, sa forme la plus commune est le katha ("histoire") ou kathakara ("faire l’histoire"), terme qui désigne de nombreuses traditions de récitation, le plus souvent chantées mais aussi simplement narrées, voire intégrées dans des formes dramaturgiques combinant différents arts. Les traditions de conteurs, ballades épiques, récitants, marionnettistes et acteurs-danseurs prévalent dans tout le pays, même si les particularités régionales sont aussi très fortes, en termes linguistiques et esthétiques. À chaque état régional correspond en effet une version locale de l’épopée – en langue hindi, telugu, tamoul, bengali, etc. –, ce qui a favorisé sa grande expansion. Qu’elle soit composée par des lettrés ou transmise oralement dans les villages, elle fait l’objet de multiples versions variant en fonction des groupes sociaux et des formes artistiques qui la font revivre. Au Kerala, en Inde du Sud, le théâtre classique kathakali ("jeu de l’histoire") s’est très largement appuyé sur ce répertoire, ainsi que sur d’autres compositions littéraires comme le Mahabharata et le Bhagavata Purana. Adapté du sanskrit, le texte de Valmiki a été recomposé à partir du XVIIe siècle sous la plume de célèbres poètes locaux et dans la langue ancienne de cette région, appelée manipravalam. Le répertoire a cependant été transmis oralement à travers le savoir des différents spécialistes que sont les acteurs-danseurs, les chanteurs et les tambourinaires, appartenant tous à des castes de haut statut. À partir de la seconde moitié du XXe siècle, l’apprentissage est relayé par l’enseignement institutionnel, impulsé et financé par le gouvernement régional du Kerala, entraînant une démocratisation progressive de cet art et, plus récemment, une internationalisation de sa transmission. 

La Mort du démon Lavanasura – Argument
Ce qui est représenté ici est la dernière partie de la grande épopée de Sri Rama, telle qu’elle fut racontée par le sage Valmiki. Cette histoire est connue sous le nom de Ramayana. En voici un bref résumé :

Le grand dieu Mahavishnu s’incarna en Rama, fils aîné du roi d’Ayodhya Dasaratha, de la dynastie du Soleil, dans le but de détruire Ravana, le tout-puissant et noble empereur des rakshasas, race mythique d’êtres surhumains, éternelle ennemie de la race des dieux (devas) dans l’ancienne mythologie indienne. Lorsque Mahavishnu renaquit en tant que Rama, divers aspects de son essence divine prirent aussi forme humaine, en les personnes de Bharata, Lakshmana et Sathrughna, les trois frères de Rama. Bientôt, la déesse Lakshmi, la compagne divine de Mahavishnu, prit vie sous le nom de Sita, fille du roi Janaka du pays de Mithila, afin de devenir l’épouse de Rama. Le roi Dasaratha se décida à nommer Rama, son aîné, héritier de la couronne, comme le voulait la coutume. Cependant, presque aussitôt, il dut renoncer à cette décision, suivant la volonté de Kaikeyi, sa seconde reine. Rama fut alors contraint de s’exiler en forêt pendant quatorze années pour respecter la promesse que son père avait faite à Kaikeyi des années auparavant. Sa femme Sita et son frère Lakshmana accompagnèrent Rama et tous s’installèrent dans la forêt (Vanvasa ou "Épisode de la vie en forêt"). Pendant ce séjour, Ravana, maître de Lanka et empereur des rakshasas, s’enflamma pour la divine beauté de Sita. Il l’enleva et la tint captive à Lanka, son royaume, dans le jardin magique qu’il entretenait, Asokavanika. Bouleversé, Rama décida de partir à la recherche de Sita, accompagné de son frère Lakshmana. Pendant leur périple, ils rencontrèrent Sugriva, prince déchu de Kishkindha, le royaume des singes, et Hanuman son conseiller. Ils firent un pacte avec eux, suite auquel Hanuman partit à Lanka pour localiser l’endroit où Ravana détenait Sita. Là-bas, Hanuman trouva Sita qui passait ses journées à se languir du souvenir de Rama et souffrait les affres de la séparation d’avec son bien-aimé. Il la consola, lui donna en guise de message l’anneau de Rama et lui assura qu’il arriverait vite, livrerait bataille à Ravana, le tuerait et la ramènerait chez eux. Bientôt, Rama et Lakshmana, aidés par Hanuman et Sugriva, assassinèrent Ravana et installèrent sur le trône de Lanka Vibhishana, frère de Ravana et ardent partisan de Rama. Après avoir mis un terme à son exil en forêt, Rama retourna à Ayodhya pour y régner, et tandis qu’il gouvernait le pays, Sita tomba enceinte. Un jour, vint aux oreilles de Rama cette histoire : un homme du peuple, un blanchisseur, avait battu sa femme parce que, après une visite à ses parents, elle était revenue au domicile conjugal un jour plus tard qu’à l’accoutumée. Le blanchisseur avait alors insinué qu’il n’était pas si naïf que Rama, lui qui avait accueilli sa femme Sita sans soupçons après sa si longue captivité chez Ravana. Apprenant que ses sujets doutaient de la chasteté de sa propre reine, Rama décida alors de se mettre à l’abri des scandales en se séparant de Sita. Sous prétexte d’exaucer son voeu – elle souhaitait revoir l’endroit où ils avaient vécu –, Rama l’envoya dans la forêt accompagnée de Lakshmana qui avait l’ordre de l’y abandonner. Entendant les lamentations de la femme enceinte, le sage Valmiki (auteur du Ramayana !) décida de lui donner asile dans son ermitage. Arrivée à terme, Sita donna naissance à un garçon du nom de Lava. Un jour qu’elle commençait à s’inquiéter pour son fils qui était parti jouer en forêt et tardait à revenir, Valmiki conçut un autre garçon à partir de l’herbe kusha1 et le nomma Kusha. Ainsi, Sita devint mère de deux garçons. À Ayodhya, le roi Rama avait décidé d’organiser un grand ashvamedha yaga, un sacrifice du cheval extraordinaire pour la prospérité de ses sujets et le bienfait de son royaume. Avant même de conduire ce yaga, Sathrughna, le troisième frère de Rama, parvint à tuer Lavanasura, démon des océans qui sévissait sur la terre. Alors le ashvamedha yaga put commencer et Sathrughna se mit à suivre le cheval blanc qu’on avait lâché dans le royaume. Le devoir de Sathrughna était de le protéger et de combattre quiconque oserait refuser la suzeraineté de Rama en s’en emparant avant que, de retour à Ayodhya, le cheval ne soit sacrifié. C’est dans ce contexte que se tient la représentation de ce soir. Le texte (attakkatha) est en vers. Les paroles de chaque personnage sont dites avec l’état d’esprit et l’émotion requis pour chaque situation, et sont accompagnées d’une musique appropriée, les chanteurs se trouvant sur scène derrière les acteurs.

Photos © flikr licence CC